Alban Berg n'a décidément pas fini de se retourner dans sa tombe.

Il y a une vingtaine d'années, j'avais assisté à la présentation, lors d'une émission de France Musique consacrée au second quatuor, d'un roman pas inspiré, mais juste calqué sur l'un des chefs d'oeuvre du viennois. Prétaxte à avoir quatre personnages, 6 chapitres reprenant les titres des 6 mouvements, l'intrigue sublimée par Berg devenant une gaudriole explicite dont un grand comédien dont j'ai oublié le nom donna quelques extraits dont le mieux était d'en rire. En fin d'émission, un quatuor invité interprêta enfin l'oeuvre elle-même.

Aujourd'hui, je découvre dans le métro des affiches vantant le nouveau livre d'un écrivain que je n'éreinterai pas ici, d'autres s'en chargeant avec bien plus de compétence et de style en d'autres endroits. Cet ouvrage dont l'affiche laisse entendre qu'il s'agit d'une nième bluette sentimentalo-bien-pensante, porte le nom du concerto pour violon.

Et il y a quelques années nous avions aussi eu une pub pour le parfum "Loulou" avec une minette façon Louise Brooks et comme musique... la pavane de Fauré. Evidemment, on n'allait pas nous vendre un parfum en illustrant par le cluster qui accompagne la mort de l'héroïne des images des meurtres, manipulations, luxures et escroqueries boursières qui parcourent l'oeuvre entière.

Pas plus qu'on ne nous vend un roman avec en couverture la jeune Manon Gröpius et son typhus, sur fond de la Carinthie chère à Jorg Haider. Ou qu'on ne proposera une sauce tomate sur fond sonore d'Altenberg-lieder en oubliant les cartes postales érotiques d'origine. Ou, pourquoi pas, des pillules bleues portées avec l'enthousiasme du docteur dans la scène 4 de Wozzeck. A-t-on mangé ses pois?

Notre pays déteste la musique, on le sait, et il nous le rappelle régulièrement. Pourvu que ces lignes ne donnent d'idée à personne...