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Saint Luigi des ascenseurs
--> Que Brecht me pardonne

Assumons quelques instants notre vaste inculture.

Je me suis récemment retrouvé devant une brève partition intitulée "Menuet - Luigi Boccherini". On sait toute l'estime que j'ai pour ce compositeur contemporain de Haydn, qui composa des quintettes au kilomètre comme aux pires moments de l'époque baroque pourtant révolue depuis des décennies. Le peu que j'avais eu l'occasion jusqu'ici d'entendre en association avec son nom a toujours immédiatement rejoint la case poubelle sans laisser aucun souvenir.

Me voici donc face à la chose, avec une rythmique un peu originale, je commence à déchiffrer (je n'entends pas ce que je lis tant que je ne le joue pas, ça viendra peut-être un jour), et... je m'entends jouer le générique de voisins voisines.

Pour ceux qui auraient raté un formidable épisode de création idio-visuelle française, il s'agit de la lie de la sit-com, vaguement improvisée, diffusée entre 2 et 5h du matin pour répondre à la lettre aux exigences quantitatives de création françasie imposée à une certaine époque aux chaines de télévisions. Je crois que c'était sur la cinq de Berlusconi ("cinq you la cinq" disait Patrick Sabatier) mais c'était peut-être sur M6. les épisodes duraient 15 ou 20 minutes et pouvaient tourner à plein régime sur un thème métaphysique. Par exemple :

  • On sonne à la porte ("tu n'as pas entendu quelque chose? Je crois qu'on sonne", 30 secondes).
  • Mais qui peut-ce bien être ? (1 minute facile)
  • On regarde au judas. "Oh c'est Fulbert. Tu sais quoi, il paraît qu'il n'est plus avec Gutrune!" (au moins 1 minute).
  • On lui ouvre, lui dit bonjour on se fait la bise, on se présente au cas où il aurait oublié depuis l'épisode précédent (1 minute)
  • "Oh, des fleurs comme c'est gentil, et en plus elles sont jolies et sentent bon" (30 secondes).
  • "Mais où vais-je les mettre. Un vase? Non je n'en ai pas. Une carafe/bouteille d'eau/aquarium du poisson rouge/cocote minute", en cherchant et ouvrant toutes les portes de tous les placards du décor (enfin, celles qui s'ouvrent) et en commentant ce qui s'y trouve. 3 minutes au moins.
  • "Comment ça s'appelle ces fleurs-là" (30 secondes). "Tu es sûr? Ca s'écrit comment fuchiat?" (30 autres secondes)
  • "Ah, comme c'est intéressant. Cherchons le mot dans le dictionnaire" (30 secondes). Lecture de 5 autres mots rencontrés en cherchant, ponctués de "non c'est pas ça" (30 secondes)
  • Lecture de l'article Fuchsia, lentement mais en balbutiant (3 minutes facile).
  • "Yavait pas une chanson sur les fuchsia? Mais si, tu te souviens, le type chauve là. Oui, Sim. Ah, c'était les rododindrons?" (30 s). "Ca s'écrit comment déjà" (1 minute, c'est compliqué)
  • Lecture de 5 mots en passant, puis de l'article rhododendrons (4 minutes).
  • "Ah c'est fou ce que c'est intéressant, les dictionnaires, on en apprend tous les jours" (30 s).

Là on en est à peu près à 20 minutes, il est temps de renvoyer Boccherini. Un grand moment de télé.

Pour en revenir à Boccherini, j'ai toujours trouvé sa musique totalement insipide, tout en ignorant que l'insupportable menuet qui ornait notre belle sit-com, l'un des rares passages de musique classique à servir dans les ascenseurs et toilettes, était de lui. J'aurais pourtant dû m'en douter.

Ecrit par schlopotok, le Dimanche 9 Mai 2010, 15:38 dans la rubrique Bruits.